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FISCAL – Le sursis de paiement
Actualité Fiscal du 2 octobre 2018
Lorsque l’administration fiscale réclame des rappels de droits au contribuable vérifié, celui-ci dispose en général de possibilités de contestation des sommes en cause. Cependant, le droit fiscal étant une branche du droit administratif, le principe général selon lequel l’exécution de l’acte n’est pas suspendue par l’introduction d’une réclamation trouve à s’appliquer. En d’autres termes, le contribuable qui conteste le rehaussement est en principe tenu de l’acquitter.
Mode d’emploi du sursis de paiement
Pour éviter les conséquences néfastes d’une telle pratique, le législateur a prévu un sursis sur demande. Il est à formuler expressément dans la réclamation contentieuse adressée au service des impôts compétents.
Au-delà d’un montant fixé par décret, aujourd’hui de 4 500 € de droits rappelés, le contribuable doit présenter au comptable public des garanties afin d’assurer le recouvrement des intérêts du Trésor public. Pour résumer, le comptable public peut les estimer suffisantes et accepter d’octroyer un sursis, ou les juger insuffisantes et rejeter la demande.
Quelles garanties, dans quelles conditions ?
Une Cour administrative d’appel vient de rendre un arrêt intéressant les conditions des garanties, en l’espèce le nantissements des parts d’une SARL.
La garantie proposée doit satisfaire à deux conditions principales, la sécurité et la disponibilité.
Par sécurité, il convient d’entendre que la valeur de l’objet remis en garantie couvrira en tout temps la créance éventuelle du Trésor public sur le contribuable. On notera d’ailleurs que le comptable public dispose de la possibilité de réclamer des garanties complémentaires lorsque la valeur du bien initial ne suffit plus.
La disponibilité caractérise la possibilité d’appréhension de la somme due par le Trésor public : capacité à vendre l’objet remis en garantie, quel qu’il soit, c’est-à-dire à le liquider, à le transformer en une somme d’argent venant éteindre en tout ou partie la dette du contribuable.
L’arrêt permet d’illustrer ces deux conditions s’agissant d’une société holding de droit luxembourgeois. Cette condition de nationalité ne remet en rien en question les apports de la décision, transposable aux sociétés de droit français.
S’agissant de la sécurité, les juges constatent que la valeur de la société holding est fortement liée à celle des titres de participation inscrits à son bilan. La valeur réelle des titres au cours de l’instruction suffit amplement à désintéresser le Trésor public, mais elle est nécessairement fluctuante, donc à risque. En outre, le juge attire l’attention sur le faible capital de la société, qui n’offre aucun gage à l’administration. La condition de sécurité n’est donc pas satisfaite en l’espèce.
Le juge aurait pu s’arrêter ici dans son examen et rejeter la demande. Tenu d’examiner l’ensemble des moyens présentés, c’est aussi l’occasion de se prononcer sur la condition de disponibilité des fonds.
Les statuts de la SARL dont les parts sociales étaient proposées en nantissement font état d’une clause d’agrément. En d’autres termes, la cession des parts, permettant d’en récupérer un prix – de les liquider – pour que le Trésor se paye dessus, pouvait être refusée par la collectivité des associés de la SARL. Le juge semble admettre qu’une décision préalable et irrévocable de cette collectivité, permettant la cession au profit du Trésor des parts à nantir, aurait pu suffire à lever la condition de disponibilité. La condition de disponibilité n’est donc pas plus remplie, et le juge rejette la demande de sursis présentée par le contribuable.
Un conseil professionnel aurait pu faire remarquer au client requérant qu’une jurisprudence fournie en la matière a d’ores et déjà été rendue, et qu’il convenait de respecter les principes dégagés à cette occasion.
En effet, ce sont bien les juges du fond qui sont compétents pour apprécier l’adéquation de la garantie proposée à la dette du contribuable : il faut donc respecter ce qu’ils tiennent pour acquis.
En termes de nantissement de titres non cotés, il est fréquemment exigé par les juges depuis 1993 de compléter par un cautionnement personnel ou mieux, par un cautionnement bancaire, garantissant selon les cas tout ou partie de la dette. Concernant l’agrément préalable des autres associés, la jurisprudence sur ce point est claire depuis 1999.