PAIE – Dossier du mois : congés payés et arrêt maladie : quels changements ?

Actualité Droit du travail, Paye du 18 juin 2024

Les sénateurs et députés réunis en commission mixte paritaire le 4 avril 2024 ont abouti à un accord sur l’ensemble du texte venant modifier définitivement l’article L 3141-5 du code du travail. Le Sénat et l’Assemblée Nationale ont également validé ce texte le 10 avril 2024.

Mais alors de quoi s’agit-il ?

Pour le comprendre, nous devons revenir un peu en arrière et voir qu’il s’agit là d’un changement, non pas de texte, mais la définition même du mot « travail effectif ».

Pour faire un bref historique de l’acquisition des congés payés et des périodes de maladie, en droit français les périodes de maladie ne sont pas assimilées à du temps de travail effectif et ne déclenchent donc pas le calcul et cumul du congé payé.

Les Instances Européennes quant à elles, CJCE dans divers arrêts et la charte des droits fondamentaux de l’UE, indiquent tout autre chose et cela depuis 2009. Or, pour être applicable, une directive européenne doit être transposée en droit national.

Si tel n’est pas le cas, le justiciable ne peut pas l’invoquer devant les tribunaux.

En septembre 2023, coup de tonnerre pour la France lors de 2 arrêts majeurs concernant sa position désormais sur l’application ou non des directives européennes. Faute de transposition, elle fait primer le droit européen sur le droit national.

A partir de là, s’est engagé une mise en conformité et une application quasi systématique du droit européen.

Il s’en est suivi une interrogation des entreprises et des salariés sur l’application en temps réel de ces jurisprudences.

Les changements apportés par la nouvelle loi

A partir de la mise en conformité du droit français, les articles L3141-5 du nouveau code du travail sont modifiés et viennent apporter les réponses à toutes les questions.

C’est la définition même de travail effectif qui est ici mise en avant.

Les périodes de travail effectif pour la détermination des droits des salariés à congés payés comprennent désormais les périodes de suspension de contrat telles qu’accident du travail ou maladie professionnelle excédent un an, les accidents ou maladies non professionnels. Globalement, c’est l’ensemble des arrêts de travail pour maladie qui ouvre droit à congés payés. Le congé paternité également bénéficie maintenant de cette loi.

Il en est de même pour les travailleurs temporaires qui avaient une indemnité compensatrice de congés payés pour chaque mission.

Mais alors quel calcul devons-nous opérer pour le cumul des congés ?

La durée légale du congé annuel variait si le calcul était en jours ouvrés ou ouvrables. Le salarié comptait 2,08 jours ou 2,5 jours par mois pour un travail effectif total. La période de référence quant à elle représente 1 an du 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours (cette période est différente par exemple si l’entreprise adhère à une caisse de congés payés).

Avec la nouvelle loi, les périodes d’arrêt de travail pour cause d’accident ou de maladie non professionnels n’ouvrent droit qu’à 2 jours ouvrables ou 1,66 jours ouvrés. Soit une limite annuelle de 4 semaines par période de référence (80 % de la durée habituelle).

C’est ici la stricte application de l’article 7 de la directive de 2003/88/CE qui indique que « tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins 4 semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales ».

Pour les autres absences, rien ne change, l’acquisition est toujours de 2,5 jours ouvrables ou 2,08 jours ouvrés.

Enfin, le calcul de l’indemnité de congés payés au dixième subit la même règle que le cumul, à savoir que la rémunération est prise en compte dans la limite de 80 %.

Quels sont les impacts pour les employeurs ?

Les impacts sont multiples. Ils doivent désormais informer les salariés du nombre de jours de congés cumulés pendant la maladie et la date à laquelle ils doivent les avoir soldés. Cette information est à donner dans le mois de la reprise par tout moyen qui garantit la bonne réception.

Sauf exception, cette information datera le début de la période de report. Cette période minimale de report fixée par la loi est de 15 mois. Il est possible d’allonger ce délai par voie d’accord d’entreprise, d’établissement, de convention ou d’accord de branche.

L’article L3141-19-1 al 2 du nouveau code du travail prévoit que la période de report débute à la date d’information de l’entreprise du nombre de jour de congés à prendre. Mais la loi distingue aussi le cas d’absence de plus d’un an couvrant la totalité de la période de référence. Cette période de report débutera alors à la fin de la période de référence et non pas à la date d’information (article L3141-19-2 al 1 du nouveau code du travail). Cela voudrait dire que les droits à congés payés acquis pendant une absence longue durée seraient alors définitivement perdus au bout de 15 mois même si le salarié est toujours absent.

 

 

 

 

 

 

Quels sont les impacts pour les salariés ?

Quid des arrêts maladie non professionnels avant l’entrée en vigueur de la loi ?

La loi est très claire et indique une rétroactivité au 1er décembre 2009. Il est bien précisé que les congés acquis entre le 1er décembre 2009 et l’entrée en vigueur de la loi n’excéderont pas les 24 jours ouvrables de congés par période de référence.

Les salariés toujours en poste, ont 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour mener des actions en octroi des congés payés acquis pendant des périodes de suspension.

Pour les salariés dont le contrat serait déjà rompu, l’article 3245-1 du code du travail prévoit une prescription de 3 ans pour agir à compter de la rupture de leur contrat de travail.

Rédacteurs : groupe de travail RH ABSOLUCE