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SOCIAL – Non-dénonciation des chauffeurs : deux sociétés condamnées en Côte d’Or
Actualité Social du 4 décembre 2018
Le dirigeant de deux sociétés de restauration opérant dans la région Côte de Beaune a été condamné par un tribunal de police au paiement de deux amendes de 500 € pour non-dénonciation des salariés ayant commis des infractions au Code de la route. Ses appels au pragmatisme et à la souplesse exigés par toute activité économique, comme le risque de contentieux prud’homal en cas de dénonciation, n’ont pas emporté la clémence des juges.
Ce nouveau fait divers de Côte d’Or est l’occasion de revenir sur le régime de dénonciation des conducteurs de véhicules immatriculés au nom de l’entreprise personne morale, près de 2 ans après son entrée en vigueur et au regard des relatives précisions administratives et judiciaires.
Depuis le 1er janvier 2017
La loi Justice du XXI ème siècle du 18 novembre 2016 a renforcé la lutte contre l’insécurité routière en étendant la responsabilité du dirigeant.
Depuis la loi Gayssot II, ce dernier était déjà pécuniairement responsable des amendes infligées en réparation de certaines infractions au Code de la route, sauf à pouvoir prouver un cas de force majeure.
Désormais, le dirigeant est censé déclarer l’identité, l’adresse et le numéro du permis de conduire du contrevenant au titre de certaines infractions repérées par contrôle automatique, dans les 45 jours de l’avis de contravention. S’il ne le fait pas, il assumera comme précédemment les conséquences de l’infraction, et commettra en plus un nouvel acte réprimé par une amende digne d’une contravention de 4e classe, d’un montant maximal de 750 €. « Une double peine » que le restaurateur n’a pu contester, en ce qu’elles ne punissent pas les mêmes faits.
Une extension imprévue
Les avis de contravention reçus par les dirigeants qui conservent le silence font parfois état d’une amende infligée à la société personne morale, d’un montant quintuplé (soit 3 750 € au maximum) en application du principe général du droit pénal. L’infraction est alors imputée à la personne morale, l’abstention étant réalisée pour son compte par son représentant légal – lequel pourrait d’ailleurs être poursuivi au titre de sa complicité.
Cette interprétation extensive et contestable n’a pas été clarifiée par les autorités dans le cadre d’une circulaire pourtant annoncée. Cependant, en février 2018, le Ministère de la Justice a précisé à un parlementaire que si l’obligation de dénonciation pèse sur le représentant de la personne morale, c’est bien cette dernière qui est tenue au paiement de l’amende. Il s’agit là d’un levier dissuasif plus efficace.
En l’occurrence, le ministère public avait réclamé le paiement d’une amende de 675 € par chacune des sociétés poursuivies. Ce tarif n’est pas anodin : il s’agit du quintuple de l’amende forfaitaire de 135 € prévue pour les contraventions de 4e classe.
Ce régime tel qu’appliqué en pratique est particulièrement contestable, tant au regard des grands principes du droit de la défense qu’au regard des principes généraux du droit pénal. Toutefois, si les contrevenants peuvent avoir gain de cause dans le cadre de requêtes gracieuses ou juridictionnelles individuelles, aucune contestation d’ampleur n’a encore mobilisé avec succès les nombreuses failles qui émaillent ce dispositif.